La prison enforestée. Arnaud Théval
Maison d’arrêt pour hommes de Draguignan
Installation pérenne (2020)
2017-2020
Avec le soutien du ministère de la Culture (département de l’éducation et du développement artistique et culturel), de la direction interrégionale des Services Pénitentiaires PACA-Corse, de la maison d’arrêt pour hommes de Draguignan, de l’association Plateforme.
Avec le concours du Muséum départemental du Var à Toulon, de la fédération départementale des chasseurs du Var.
«La nouvelle maison d’arrêt de Draguignan est construite au milieu d’une forêt. J’y entre en janvier 2018 avant que le premier détenu n’y passe seul sa première nuit. Les peintures sont d’un blanc éclatant, les murs vierges de toutes écritures et les miroirs sont encore emballés. Tout attend que le vivant se saisisse des lieux.
Bientôt, j’entends émerger dans les récits des agents de la pénitentiaire des histoires empreintes d’intrusions animales supposées ou réelles.
La tortue Hermann a retardé la construction de cette architecture carcérale, des serpents se glissent sous les portes, des oiseaux nichent ici et là, des renards chassent dans le glacis autour du mur d’enceinte et des meutes de sangliers s’approchent de la porte d’entrée. D’autres présences semblent coexister ici avec les hommes. Les animaux de la forêt reviennent fouiner et par une lente intrusion ils investissent les imaginaires.»
Arnaud Théval
Le nom donné à cette installation pérenne prend sa source dans la lecture de l’œuvre du philosophe Baptiste Morizot « Sur la piste animale » (2018) édition Actes Sud, collection Mondes sauvages.
Démarche
Arnaud Théval construit son projet artistique sur et dans l’espace social, en élaborant des dispositifs impliquant les personnes travaillant dans les institutions sociales, ou en cours de formation. L’enjeu est la création d’un art du dissensus, inquiétant l’univers des normes, jouant avec leurs codifications et les déplaçant pour des spectateurs de et hors institution. Il en souligne les stéréotypes liés aux représentations collectives afin de déceler les assignations dans lesquelles ces personnes s’enferment ou sont enfermées en réveillant le politique.
C’est notre relation à la démocratie qui est en jeu dans ces institutions publiques, c’est en cela que son rapport à celles-ci dans l’espace de l’art est central pour en dégager ce vers quoi elles tendent parfois : à se refermer sur des dispositifs auto-normant, voire auto-bloquant. L’œuvre se développe selon une temporalité longue et de manière fragmentaire. D’abord en créant dans ces institutions des espaces de travail qui deviennent l’atelier même de l’artiste. La rencontre s’opère au cœur d’un processus croisant des approches documentaire, anthropologique et philosophique.
Cette approche intimiste met en avant des singularités individuelles ouvrant sur la création d’une œuvre à l’extimité soucieuse du respect de l’autre. Cette dimension inclusive s’appuie sur une altérité permanente qui fait émerger depuis leurs récits une certaine corporéité au sein de l’institution. Elle engendre des productions tantôt photographiques, tantôt textuelles – une écriture de type narration non-fictionnelle -(discours, conférences, lectures, écrits) révélant les dissensus sous-jacents. Les installations d’images dans le lieu même de leurs créations créent des situations qui deviennent l’objet d’une nouvelle mise en récit avec une prise de distance affinant la critique des enfermements lors d’expositions et pour des publications.
Livre : Prison lisière. 128 pages. 21.5 x 28 cm. Editions Dilecta 2020.
https://editions-dilecta.com/fr/82_theval
Prestations PICTO Méditerranée : Impression et tirage numérique sur supports souples et rigides. Papier peint, support adhésif texturé, impression sur Dibond. Pose sur site.